Poésies en Folies

poésies, écrits, pensées, exercice libératoire, partage universel

Je fus longtemps un être normal Du moins je l'ai cru. Alors, comme un être normal, j'ai jugé, L'esprit plein de préjugés. Ceux qui étaient différents, les gueules cassées, Les handicapés mentaux, les esprits tourmentés. Je n'y ai jamais vu un problème, Me sentant supérieur devant ces visages blêmes. Ils ont toujours été, entre proches, entre amis, Le sujet de moqueries. À la télévision aussi, tout le monde se gausse, On nous a mal éduqués, méchants et féroces.

Les années passent, je ne vois pas pourquoi on changerait quoi que ce soit. Puis voilà : hospitalisé en unité psychiatrique, Je fais partie du groupe, c'est un bon coup de trique. Ils sont là tout autour de moi, le choc est violent. On se demande ce qu'on fait là, Puis on comprend pourquoi. On pleure, touché par leur parcours et leur empathie en retour.

Elle a 15 ans, déjà plus de parents, Elle se mutile, Dans quelques années elle pourrait être ma fille, À moi elle se confie, Sa vie n'est qu'une succession d'événements violents, Je réalise qu'il n'y a pas de hiérarchie, Chacun porte sa part de trouble, c'est ainsi. Un grain de folie, eux comme moi — c’est notre lot à tous, c'est la vie.

Nous pouvons tous être porteurs, petits et grands. Je ne suis pas meilleur, pas même intelligent. J'ai vécu comme un insensible, arrogant. La maladie mentale est pour moi, toujours devant. Mais je ne suis pas seul, nous sommes des milliers.

Et jamais plus je ne vous jugerai. Qui suis-je pour le faire ? Je dois désormais éduquer, Sensibiliser et expliquer. Pour que mes enfants soient bienveillants et grandissent dans le respect.

Un an et demi, Une longue durée pour beaucoup, Une simple enjambée dans ma vie. L'impression d'être fou, Puis de trouver un nouveau goût à la vie. Je n’y ai pas mis les pieds du tout, Dans mon jardin de Californie.

Un paysage étrange, au pays du biniou, Des plantes qu’il faut protéger des intempéries, Envahies de mauvaises herbes, leurs contours sont flous. Et nous voilà à genoux, à arracher le chienlit, À se débarrasser d’un tas de plantes qui gâchent tout. Un travail pénible, qui semble infini…

Mais bientôt viendra le plaisir de marcher à pas doux, Dans les allées, des plantes venues des États-Unis, Du Mexique, des déserts aux charmes fous. Les mains dans le dos, je hume avec envie : La floraison des cactus m’a toujours surpris.

Je me demande : comment améliorer, embellir, remanier tout ? Je me projette, je calcule, fais des plans, je réfléchis, Pour me rapprocher de l’image de mon paradis. C’est le travail d’une vie — j’ai bien fait de lui donner un sursis.

Un an et demi après, j’ai renoncé à mourir. Je préfère continuer à me nourrir, De tous ces illustres jardiniers, qui continuent de m’inspirer. Leurs jardins remarquables, c’est avec mes enfants que je les partage. J’espère que la passion se perpétuera en avançant dans leur âge.

J’ai désormais envie de transmettre. J’ai cessé de vouloir disparaître.

En boucle, j’écoute de vieux artistes, Créant de nouveaux sons, évoquant de vieilles pistes. Je pense… donc je suis triste. Planté au milieu d’un carrefour, je murmure des vœux aveugles, Sous mon crâne, mes pensées beuglent, Perdu comme un pingouin lâché dans le désert, Je cherche la boussole qui guidait nos pères.

Trouver un nouveau job… comment faire ? Le timing est mauvais, l’issue encombrée. Dans La Misère du Monde, j’aurais pu témoigner ; Pierre Bourdieu aurait sûrement apprécié. Tout quitter : est-ce vraiment une bonne idée ? Repartir à zéro, réapprendre n’est pas sans risque. Des factures à payer, j’en ai toute une liste.

Reste un tas de questions sans réponse : Qui je deviens si je fais silence ? Où je vais si je prends distance ? Le geste se répète, et dans mes oreilles s’enfoncent Des sons d’aujourd’hui qui résonnent comme hier… J’espère, un jour, stopper cet air.

Je les vois, et désormais je suis eux. Je les regarde, et je sais que L’absurdité est censée dans des cerveaux bien constitués. Ces voix que vous entendez, qui m’étaient étrangères, Désormais appréhendées, me sont devenues familières. Qu’elles vous soient douces, et non qu’elles vous poussent À déraper, vous privant de votre liberté.

Baignant dans un mal congénital que rien ne peut effacer, Tournent autour de moi, non plus des gens à enfermer, Mais de beaux êtres singuliers — Qu’ils soient Jésus ou un peintre très connu. Sur l’Adamant, elle le sait : elle sera guérie. Les yeux grands ouverts, derrière ses lunettes, elle a raison d’y croire. Les écouter tous, libère nos esprits des idées noires. Pour ma part, je vais avancer au doigt mouillé, Comme le chante MC, si je peux le plagier. Le doigt mouillé… mais les yeux enfin secs. Et l’idée d’un cap revient, timide, dans ma tête.

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